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LES EAUX GLACÉES DU CALCUL ÉGOÏSTE
REMOUS
L’armée secrète de libération de Seine-Normandie a pris le maquis
par Marc Laimé, 2 avril 2008

Un mouvement de révolte sans précédent depuis leur création en 1964 est né dans les Agences de l’eau, établissements publics de l’Etat et épine dorsale de la politique de l’eau en France. Alors que va s’ouvrir le 15 avril prochain une consultation nationale lors de laquelle tous les Français sont invités à donner leur avis sur les grandes orientations de la politique de l’eau, la « réforme » du tentaculaire ministère dirigé par M. Jean-Louis Borloo, la « réforme de l’Etat » qui s’accélère avec la deuxième rencontre de la Révision générale des politiques publiques (RGPP), le 4 avril prochain, « réformes » qui se traduisent surtout par un démantèlement sans précédent des politiques publiques de l’environnement, conduisent de nombreux fonctionnaires des corps de l’environnement à exprimer publiquement leur indignation. A l’Agence de l’eau Seine-Normandie, "l’Armée secrète de libération de Seine-Normandie" vient de publier le troisième numéro du bulletin « Le Bassin enchaîné », qui dénonce sans fard les « réformes » en cours.

La tenue du second « Conseil de modernisation des politiques publiques » le vendredi 4 avril 2008, suscite une mobilisation sans précédent des personnels du ministère de l’Ecologie et de leurs organisations syndicales.

Lors du premier conseil organisé le 12 décembre 2007, le gouvernement de M. François Fillon avait, notamment, décidé la fusion, d’ici à 2010 et dans l’ensemble des départements, des directions départementales de l’équipement (DDE) et des directions de l’agriculture et de la forêt (DDAF).

La fédération Force ouvrière de l’équipement craint désormais l’annonce d’une réduction des effectifs du ministère de 8000 personnes entre 2009 et 2011. Un chiffre bien supérieur à l’application du principe de non-remplacement d’un fonctionnaire sur deux partant à la retraite, qui, s’il était respecté conduirait au non-remplacement annuel de 1200 agents.


Et pour ne rien arranger, un « Livre Blanc sur la fonction publique », qui doit être remis mi-avril au gouvernement, suggère d’instaurer un nouveau type de contrat pour les non-titulaires et de limiter l’avancement automatique des fonctionnaires, faisant craindre aux syndicats un "éclatement du statut".

Pour FO, la réduction drastique des moyens du ministère ne lui permettra pas d’assurer correctement les missions qu’il assume au service notamment des collectivités territoriales.

"Là où cela va faire mal, c’est dans le domaine de l’ingénierie publique", déclarait l’un des responsables nationaux de FO équipement, M. Pascal Pavageau, interrogé le 31 mars 2008 par le site Localtis, de la Caisse des dépôts et consignations.

Pour lui, cela signifie en effet "la mort pure et simple d’un Etat conseil qui met en oeuvre le Grenelle de l’environnement aux côtés des collectivités locales".

Le syndicat a donc adressé une lettre aux nouveaux maires et présidents de conseils généraux pour les informer de ses craintes.

"Ne pouvant plus compter sur les services techniques de l’Etat ni sur leurs conseils ou leurs partenariats, les collectivités territoriales n’auraient d’autre possibilité que de se tourner vers des sociétés privées", écrit notamment la fédération FO de l’équipement.


Une analyse confortée par un article publié par le quotidien Le Monde daté du 3 avril 2008, qui confirme que : " (...) Les ministères, défense et développement durable en tête, devront continuer d’évoluer profondément. Les X-Ponts, dont l’équipement était un des fiefs, devront probablement abandonner au privé une partie de l’ingénierie publique pour développer une expertise sur le développement durable et la lutte contre le réchauffement climatique, etc."

Le 6 mars 2008, 10 000 agents du ministère de l’Ecologie manifestaient à Paris à l’appel de plusieurs organisations syndicales pour obtenir des moyens et des garanties quant à l’avenir de leur ministère.

Le directeur de cabinet de M. Jean-Louis Borloo tentait de « rassurer » les manifestants. Selon l’Union des syndicats de l’équipement-CFDT, il a confirmé le 6 mars 2008 que le ministère conserverait ses services déconcentrés avec l’ensemble de leurs missions et prérogatives, alors que le ministère de l’Intérieur avait souhaité que les services territoriaux du ministère de l’Ecologie soient placés sous la coupe du préfet.


Concernant l’ingénierie publique, le collaborateur du ministre aurait déclaré qu’il n’était "pas question de l’abandonner", mais de "l’adapter aux nouveaux enjeux".

L’adaptation aux « nouveaux enjeux »

Nous avons interrogé un fonctionnaire directement concerné par ces « réformes ».

Un point non négligeable de cette RGPP concerne donc le rôle des DDAF dans les départements. A la fois les services "polices de l’eau", dont le rôle est bien sûr primordial pour tout ce qui concerne les stations d’épuration (STEP) et autres autorisations de rejet.

« On ne voit toujours pas venir le renfort nécessaire qui permettrait de bien faire le boulot de contrôle. » Surtout après le démantèlement des Satese, que nous avons déjà longuement évoqué à l’automne dernier !

Mais aussi les services d’ingénierie.

« Ici, il ne s’agit pas de la maîtrise d’oeuvre, qui, même si elle a encore un rôle important dans certains départements, est amenée à disparaître inexorablement. Il y a bien sûr eu des excès... mais on voit déjà certains bureaux d’études privés reprendre le rôle de "maître d’oeuvre officiel" comme à l’ancienne... Il s’agit plutôt du rôle d’assistant-conseil que tiennent les DDAF à propos du contrôle d’affermage et des passations de contrat. Un vrai rôle de service public auprès d’élus qui n’ont pas forcément les moyens de faire face aux "entreprises de l’eau". Si la RGPP décide d’ôter aux DDAF les missions d’ingénierie, elles seront réalisées par les bureaux d’étude privés. Qui peut croire que ces bureaux d’études privés peuvent faire face aux pressions aussi facilement que des agents d’Etat, indépendants... du privé et du politique. Et qui reprendra la main... et ne la lâchera pas ? Depuis 5 à 10 ans il y avait pourtant un gros travail réalisé par le Ministère de l’Agriculture, appelé le groupe national "GSP", qui risque de disparaître ! Bien sur il y avait encore énormément de choses à améliorer, sachant que nous ne sommes pas les décideurs. Les élus font parfois des choix... difficiles à comprendre. Du coup, concernant l’ONEMA, comme il y a de fortes chances que ce soient les DDAF qui soient chargées de recueillir et collecter les données des SISPEA, on voit mal comment cela pourrait fonctionner correctement... »

Les incertitudes concernant l’avenir de l’administration déconcentrée du ministère de l’Ecologie sont désormais telles qu’elles pèseraient sur les choix des personnels pour leur carrière. Selon des responsables CGT de la direction départementale de l’Ariège, l’Etat aurait des difficultés à recruter des cadres pour ses subdivisions territoriales, au moment où l’on peut penser que certaines disparaîtront...

Dans une longue analyse publiée le 3 avril 2008, Localtis évoque les conclusions d’une sociologue du CNRS, Mme Nelly Mauchamp, qui a étudié l’évolution des métiers exercés dans les 8 nouvelles DDEA créées à titre expérimental dès 2006. Le constat est sans appel :

« L’étude préconise (...) de développer l’activité de médiation en amont des contentieux, particulièrement dans le domaine de la gestion de l’eau, "un des grands enjeux de l’avenir". Les auteurs des recherches observent par ailleurs le développement dans tous les départements de référents territoriaux chargés de "porter" les politiques publiques de l’Etat et de conseiller les élus locaux dans la réalisation de leurs projets.
D’une manière générale, l’administration de l’Etat aura besoin de compétences très pointues. Mais pour se doter de tels savoir-faire, elle devra accepter de se remettre en cause. "Le problème est aujourd’hui qu’on ne peut pas faire carrière dans la fonction publique d’Etat sans changer tous les trois ans de département et de domaine", déclare Mme Nelly Mauchamp, qui a participé à l’étude. Dans ce contexte, "celui qui veut se spécialiser doit aujourd’hui faire une croix sur sa carrière". Alors "comment faire en sorte que des agents se spécialisent en hydrologie par exemple ?", se demande la chercheuse.
L’étude finale sera remise en juin prochain aux secrétaires généraux des ministères de l’Agriculture et de l’Ecologie. »

Vent de révolte à Seine-Normandie

Dans ce contexte on comprend mieux la véritable révolte qui a touché jusqu’à l’Agence de l’eau Seine-Normandie, la plus grande, et la plus riche, agence de l’eau française, dont un groupe d’agents, manifestement excédés par les manigances de leur direction, viennent de rompre l’omerta en diffusant un brûlot qui a suscité l’ire de M. Pascal Berteaud, ci-devant Directeur de l’eau de « Mes dates », et grand architecte des « réformes » en cours.

M. Berteaud stigmatise ainsi « des attaques méprisables (qui ne font) que révéler la lâcheté de leur auteur. »

Puisque c’est lui qui le dit, on lira donc avec le plus grand intérêt le N° 3 du « Bassin enchaîné », qui mentionne il est vrai malignement comme Directeur de la publication « M. Jean-Louis Bordeleau... »

Le Bassin Enchaîné n°3

Une phrase : « La liberté dans une démocratie n’est pas assurée si le peuple tolère que la puissance privée grandisse au point qu’elle devienne plus forte que l’Etat démocratique lui-même, ce qui fondamentalement est le fascisme »

Franklin Roosevelt. Message au Congrès. 1944.

Lire aussi :

La fronde des Comités de bassin

La fronde des Comités de bassin (2)

La nouvelle politique de l’eau : une gouvernance aux airs de balkanisation

Adieu services publics, l’Institut de la gestion déléguée redessine la France d’après

Les données environnementales françaises sont-elles fiables ?

La loi sur l’eau privatise les services publics (1)

La loi sur l’eau privatise les services publics (2) : Menaces sur la police de l’eau

La loi sur l’eau privatise les services publics (3) : Les Satese soumis à la concurrence

La loi sur l’eau privatise les services publics (4) : Plaidoyer pour les Satese

La loi sur l’eau privatise les services publics (5) : Le « plan de bataille Borloo » pour traiter les eaux usées

La loi sur l’eau privatise les services publics (6) : L’exécution des Satese

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commentaires

1 L’armée secrète de libération de Seine-Normandie a pris le maquis

Par curiosité, où peut-on se procurer les numéros 1 et 2 ?

poste par X - 2008-04-2@22:33 - repondre message
2 un peu d’histoire

eh oui, la RGPP sonne le glas de l’ingénierie dite publique (comme de bien d’autres trucs publics...)

Si l’action des DDAF et DDE n’a sans doute pas toujours été exemplaire, loin de là, il n’en reste pas moins qu’elle permettait à l’Etat de maintenir en interne une certaine expertise technique et une connaissance des territoires...et que l’arrivée de jeunes générations amenait un peu plus de rigueur, de morale et de sensibilité environnementale...

Plus d’ingénierie publique, des SATESE diminués, des laboratoires départementaux d’analyses également mis en compétition...
Maintenant seul le secteur privé (dans son ensemble car les connexions bureaux d’études/entreprises de travaux/fermier sont patentes) disposera de l’ensemble des informations (dans le style état stratège c’est pas mal...), ou alors les collectivités qui pourront se payer les services des cadres issus des DDAF et DDE dont la fuite commencée depuis quelques années déjà s’accélère et est vivement encouragée...

Vive la mise en compétition des terriroires, pardon, la décentralisation...

Mais bon je crois pas que le grand public se mobilisera pour cette cause alors même qu’il en est incapable pour l’Education qui le touche de façon beaucoup plus directe.

Néanmoins soulignons que cette disparition était programmée de longue date : l’ingénierie publique est une exception française, quasi-incompatible avec le droit européen. Elle avait déjà fait l’objet d’une réforme en 1999, puis d’une entrée dans le champ concurrentiel en 2001 (directive service oblige), puis moulinette LOLF : 10 ans pour démonter un service existant depuis quasiment un siècle !

Ironie de l’histoire : ce sont les élus ruraux, majoritairement UMP qui patiront le plus de cette disparition alors que j’entends déjà les conseils généraux et régionaux PS se réjouir de ces nouvelles prestations qu’ils pourront offrir pour assoir leurs succès électoraux...

poste par Stormovik - 2008-04-3@00:02 - repondre message
3 L’armée secrète de libération de Seine-Normandie a pris le maquis

Le voila l’environnement en Normandie.
http://varaville.ifrance.com/
http://varaville.ifrance.com/
Tout le monde est au courant mais personne ne s’inquiète pour la préfecture ce n’est pas un problème, la DIREN a autre chose à faire que de s’occuper de la pollution.
Quant aux élus que cela arrange, ça ne se voit pas au fond d’un chemin ou personne n’ose s’aventurer.
C’est honteux de voir des gens parler de développement durable et fermer les yeux sur une tel pollution. Vous, qu’en pensez vous ?
Nativelle P
pnativ@aol.fr

poste par nativelle - 2008-04-13@11:27 - repondre message
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