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LES EAUX GLACÉES DU CALCUL ÉGOÏSTE
REMOUS
Coupures d’eau : l’Assemblée nationale va instaurer le « lentillage »
par Marc Laimé, 18 juillet 2015

En achevant son examen en seconde lecture du projet de loi sur la transition énergétique dans la nuit du 15 au 16 juillet, le Sénat a interdit toute coupure d’eau ou « lentillage » (la réduction de débit), en rejetant un amendement déposé par M. Charles Revet, sénateur (LR) de la Seine-Maritime, et vice-président de la FNCCR, qui visait à autoriser le « lentillage », consécutivement à la décision du Conseil constitutionnel, saisi d’une QPC sur les coupures d’eau. Mais le "lentillage" va bel et bien être rétabli par l’Assemblée nationale, à l’issue d’un tripatouillage qui n’honore pas ses auteurs.

L’Assemblée va désormais avoir le dernier mot sur ce texte qu’elle examinera en lecture définitive le 22 juillet. Or, après que le Sénat ait refusé un amendement au « lentillage », c’est le dispositif initialement proposé par François Brottes, et donc ce même « lentillage » qui va revenir devant les députés, et la majorité socialiste de l’Assemblée, enferrée dans un choix impossible.

Soit voter le « lentillage », un dispositif aussi inepte techniquement qu’indéfendable sur le plan de l’éthique. Soit camper sur le « No coupures, no lentillage », au risque de voir le montant de la facture d’eau augmenter partout et pour tout le monde, en réponse à des gesticulations ineptes et intéressées, qui ont eu pour résultat d’aggraver encore une question avant tout sociale, dont la résolution ne peut peser sur les seuls services d’eau.

La « petite loi »
que doit examiner l’Assemblée nationale en lecture définitive à dater du 22 juillet 2015, reprend en effet « l’amendement Brottes » originel, qui stipule que :

Article 60 bis A

(...)

"Le troisième alinéa de l’article L. 115-3 du code de l’action sociale et des familles est complété par une phrase ainsi rédigée :

« Ils peuvent procéder à une réduction de débit, sauf pour les personnes ou familles mentionnées au premier alinéa du présent article. »

Issue prévisible d’une partie de poker menteur dans un théâtre d’ombres dont les protagonistes, rebelles d’opérette et gardiens du temple s’entendent comme larrons en foire pour préserver leurs intérêts bien compris.

C’est en effet lors d’un discret cocktail organisé il y a un mois dans les nouveaux locaux de la Fondation France Libertés (après la vente de ses locaux historiques), que François Brottes, le député (PS) de l’Isère, et auteur de l’amendement établissant le lentillage en a négocié le principe avec ses interlocuteurs. Epilogue provisoire d’une affaire en tous points lamentable, comme nous n’avons cessé de l’écrire jusqu’à ce que cet épilogue nous conforte dans notre analyse.

Rappel des faits.

- I. Le texte adopté par le Sénat en première lecture.

Cet article résultait de l’adoption en séance publique d’un amendement de M. Christian Cambon, sénateur (LR) du Val-de-Marne, maire de Saint Maurice et Vice-président du SEDIF. Il visait à modifier une disposition introduite à l’article L. 115-3 du code de l’action sociale et des familles lors de l’examen de l’article 36 de la loi n° 2013-312 du 15 avril 2013 visant à préparer la transition vers un système énergétique sobre et portant diverses dispositions sur la tarification de l’eau et sur les éoliennes.

Il résultait en effet de la rédaction actuelle de l’article L. 115-3 que, depuis le 16 avril 2013, étaient illégales toutes les coupures d’eau dans une résidence principale pour motif d’impayés - y compris lorsqu’il s’agit de la résidence de ménages solvables, alors que cette interdiction ne concernait auparavant que les ménages en situation de précarité. Le Sénat avait recentré l’interdiction des coupures d’eau tout au long de l’année aux seuls ménages précaires.

- II. Le texte adopté par l’Assemblée nationale en nouvelle lecture.

Les députés adoptaient un amendement du président de la commission spéciale, M. François Brottes, qui rétablissait l’interdiction générale de couper la distribution d’eau, avec néanmoins la possibilité de procéder à une réduction du débit servi (lentillage), si les ménages concernés n’étaient pas en situation de précarité.

- III. L’amendement à l’article 60 bis A (article L. 115-3 du code de l’action sociale et des familles) – « Distribution d’eau pour les personnes éprouvant des difficultés », déposé au Sénat à l’initiative de M. Charles Revet, sénateur (LR) de Seine-Maritime et vice-président de la FNCCR.

Il visait à rétablir en la complétant la rédaction de l’article 60 bis A qui avait été adoptée par l’Assemblée nationale, autorisant les réductions de débit en cas de facture impayée par l’abonné du service d’eau potable, y compris lorsqu’il s’agit d’une résidence principale, mais en excluant toutefois celle des personnes et familles en situation de précarité.

L’amendement déposé au Sénat

- IV. La position de la commission des affaires économiques du Sénat.

« Votre rapporteur doute fortement qu’il soit techniquement possible de réduire le débit d’eau distribué lorsque les personnes solvables ne règlent pas leurs factures. Il aurait souhaité avoir l’avis technique du Gouvernement avant de se prononcer sur le maintien ou la suppression de l’article 60 bis A. Il ne s’est toutefois pas opposé à ce que la commission supprime cet article sur proposition de M. Roland Courteau et des membres du groupe socialiste et républicain (amendement COM-99 rectifié bis). »

- V. Le rejet de l’amendement Revet par le Sénat.

M. Didier Guillaume. – Nous sommes opposés par principe aux coupures d’eau - et assumons nos désaccords avec François Brottes - comme à la réduction du débit, peut-être envisageable à petite échelle, mais assurément ingérable à l’échelle de la Nation. Ce serait mettre le doigt dans un engrenage terrible. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et républicain).

Les débats en séance

L’amendement n°20 rectifié bis n’est pas adopté.

(Applaudissements à gauche)

Article 60 bis A demeure supprimé."

On attend dès lors avec intérêt la nouvelle salve de justificatifs alambiqués qui vont, à l’Assemblée, à partir du 22 juillet, prôner un "lentillage" qui n’est que l’habillage hypocrite des coupures d’eau désormais officiellement prescrites, lors même que ledit "lentillage" produira le même effet que les coupures sur les plus pauvres.

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