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LES EAUX GLACÉES DU CALCUL ÉGOÏSTE
FIGURES
Avec « Bidoche », Fabrice Nicolino repart en guerre contre « l’industrie de la viande qui menace le monde »…
par Marc Laimé, 9 septembre 2009

Ce livre, à paraître le 30 septembre prochain, va, à tout coup, déclencher un nouveau hourvari, à l’image de ceux qu’ont suscité les deux enquêtes du même auteur qui l’ont précédé, « Pesticides, révélations sur un scandale français », et « La faim, la bagnole et nous », charge impitoyable contre les « nécro-carburants », que Fabrice pourfend avec une énergie époustouflante. Tiens, tiens, Eaux glacées fait dans le service de presse ? Exceptionnellement et voici pourquoi.

En 1990, dans une vie antérieure, Fabrice, figure haute en couleurs de l’écologie politique dont il a longtemps narré les heurs et malheurs pour Politis, s’était lancé sur la piste de « Verts-Bruns » sévissant dans le sud de la France. S’ensuivit une enquête épique qu’il proposa au mensuel dans lequel votre serviteur sévissait à l’époque.

Signe des temps, nous naviguons désormais dans des eaux voisines.

Mais Fabrice, reconnaissons le humblement, nous surpasse haut la main dans l’art de la philippique sur son blog Planète sans visa.

D’où il fustige avec une opiniâtreté digne d’éloges l’infinie variété de malfaisants et « connards » en tout genre qui nous conduisent tout droit à l’abîme.

Reste que notre homme ne saurait se résumer à la figure du fou furieux atrabilaire acharné à stigmatiser les démolisseurs aveugles de la planète, comme les faux-culs du « green washing » qui pullulent dans la période.

Ainsi vient-il par exemple de participer au lancement de l’étonnante aventure des « Cahiers de Saint-Lambert », une revue dédiée à l’écologie qui accueille parmi les meilleurs textes que l’on puisse lire sur le sujet dans la période.

Pour toutes ces raisons et mille autres, Eaux glacées publie donc avec un vif plaisir la préface du nouveau brûlot de notre ami que vous trouverez en librairie dès le 30 septembre prochain.

« Bidoche » : Pourquoi j’ai voulu ce livre

Par Fabrice Nicolino

« Je suis né pour ma part dans le sous-prolétariat urbain de la banlieue parisienne. Ce n’est pas un lieu rieur. Ce ne fut pas un temps calme. Il m’arriva plus d’une fois de rêver meilleur destin. Mais qui choisit ? Il reste que, dans les meilleures années de cette époque engloutie à jamais, ma mère préparait le dimanche midi un roast-beef, un rosbif farci à l’ail qui déclenchait chez nous tous, les enfants de cette pauvre nichée, une émeute de papilles.

« Un repas peut-il rendre heureux ? Oui. Un morceau de viande peut-il faire croire, le temps d’une tablée familiale, que tout va bien, que tout va mieux ? Oui. J’ai mangé beaucoup de viande. J’ai pris un grand plaisir à mastiquer, à partager avec les miens ce qui était davantage qu’un mets. Je suis mieux placé que d’autres pour comprendre que manger de la viande est un acte social majeur. Un comportement. Une manière de se situer par rapport au passé maudit de l’humanité, et de défier le sort promis par l’avenir.

« Je crois savoir ce que manger veut dire. Mais je dois ajouter que, chemin faisant, j’ai changé d’avis et de goût. Modifier ses habitudes est l’une des vraies grandes libertés qui nous sont laissées. Je l’ai fait. Derrière la viande, peu à peu, les morceaux, hauts et bas, se sont reformés, comme dans les dessins animés de mon enfance, qui ignorent tout de la logique triviale de la vie ordinaire.

« Derrière une côte de bœuf, j’ai fini par voir un bœuf. Derrière un gigot, un agneau. Derrière un jambon, un cochon. On peut parler d’un choc, immense et lent. L’histoire que je vais vous raconter n’est pas simple, et j’en suis le premier désolé. Elle peut d’autant plus paraître compliquée qu’elle l’est en réalité. Mais ce n’était pas une raison pour faire un livre pesant. Celui-ci ne devrait pas l’être. On y verra beaucoup d’hommes en action, prenant en notre nom des décisions plus ou moins réfléchies. Avec des conséquences majeures que la plupart ignorent.

« Cela explique les tours, détours, ruses et contorsions d’une affaire profonde, qui nous concerne tous. Ce livre sur la viande commande du temps, et de la réflexion. Peut-être est-ce une mauvaise idée de le signaler d’entrée, à l’heure d’Internet et du zapping tous azimuts. Mais c’est ainsi. Au moins ne serez-vous pas trompé sur la marchandise. Il reste que cet ouvrage peut aussi se lire pour ce qu’il est : une formidable aventure aux conséquences inouïes. Où rien n’était inévitable. Où tout aurait dû être pesé. Ou tout aurait pu être contrebalancé. Une histoire pleine de bruit et de fureur, emplie jusqu’à déborder de qualités qui sont souvent de pénibles défauts. Laissez-vous porter par cette vague venue des temps les plus anciens, et posez-vous les bonnes questions, qui vous rendront fiers d’être des humains dignes du mot.

« Comment des animaux aussi sacrés que le taureau Hap de la plus haute Antiquité sont-ils devenus des morceaux, des choses, des marchandises ? Pourquoi des techniciens inventent-ils chaque jour, en notre nom, de nouvelles méthodes pour « fabriquer » de la « matière » à partir d’êtres vivants et sensibles ? Pourquoi leurs laboratoires sont-il aussi anonymes que secrets ? Pourquoi l’industrie de la bidoche est-elle dotée d’une puissance qui cloue le bec de ses rares critiques ? À la suite de quelle rupture mentale a-t-on accepté la barbarie de l’élevage industriel ? Pour quelle raison folle laisse-t-on la consommation effrénée de ce produit plein d’antibiotiques et d’hormones menacer la santé humaine, détruire les forêts tropicales, aggraver dans des proportions étonnantes la si grave crise climatique en cours ?

« Qui est responsable ? Et y a-t-il des coupables ? La réponse n’a rien d’évident, mais elle existe, dans les deux cas. Ce livre vous convie à une plongée dont vous ne sortirez pas indemne. À la condition de le lire pour de vrai, vous ferez ensuite partie d’une tribu en expansion, mais qui demeure on ne peut plus minoritaire. La tribu de ceux qui savent. Et peut-être même rejoindrez-vous celle qui ne veut plus. A-t-on le droit de se révolter ? On en a en tout cas le devoir.

« Je mange encore de la viande. De moins en moins, et désormais si peu que j’entrevois le moment où je cesserai peut-être de le faire. Je ne suis pas un exemple. Je suis exactement comme vous. J’espère en tout cas que nous nous ressemblons assez pour que le dialogue commence. Mais avant cela, il fallait vous faire découvrir le tumulte des relations que nous entretenons avec notre sainte bidoche. Si ce livre devait servir à quelque chose, il me plairait qu’il permette à ses lecteurs de se demander ce qu’ils mangent. Et pourquoi. Et comment. »

« Bidoche. L’industrie de la viande menace le monde ». Fabrice Nicolino, éditions Les Liens qui Libèrent (LLL). Parution le 30 septembre 2009.

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