Vous voyez ce message parce que votre navigateur ne peut afficher correctement la mise en page de ce site. Effectuez une mise à jour vers un butineur qui supporte les standards du web. C'est gratuit et sans douleur.

NE PAS CLIQUER
LES EAUX GLACÉES DU CALCUL ÉGOÏSTE
REMOUS
Assainissement non collectif (94) : naissance d’un SPANC en régie à Pernes-les-Fontaines (Vaucluse), par Bernard François
par Marc Laimé, 6 décembre 2011

Dans un département particulièrement concerné par les déboires qui accompagnent l’instauration d’un nouvel encadrement réglementaire de l’ANC, le président de l’association des usagers de Pernes-les-Fontaines raconte par le menu les épisodes hauts en couleur, et terriblement révélateurs, qui ont présidé à la création d’un Spanc en régie.

« Néophytes complets en matière d’eau et d’assainissement en 2007 notre démarche est d’abord une réaction à une nouvelle taxe qui nous a été imposée par le syndicat mixte de l’eau et de l’assainissement de la région Rhône Ventoux (SMERRV), à qui a été donné la compétence SPANC par près de 35 communes du Vaucluse.

Lors d’une réunion publique d’information, la représentante du SPANC nous affirme :

 Les contrôles de nos installations individuelles sont obligatoires de par la loi sur l’eau de 2006.

 Ce travail a été confié par contrat à une filiale locale d’une multinationale de l’eau, la SDEI (Suez-Lyonnaise), qui gère par ailleurs en affermage la distribution de l’eau et l’assainissement collectif.

Aux questions posées, entre autres, sur le but et les conséquences de ces contrôles et les bases de calcul de la redevance qui nous était imposée, nous n’avons pas de réponses satisfaisantes de la part du syndicat, mais plutôt un rappel de l’obligation, et des menaces sous jacentes sur ce que nous encourons si nous refusons de nous exécuter…

Une association qui avait déjà beaucoup milité sur les questions de l’eau nous donne les premières informations. Nous décidons de créer une association et nous nous mettons au travail pour comprendre les tenants et les aboutissants de ces contrôles.

Ne pas pouvoir avoir de réponses claires, ajouté aux contrôles effectués par une multinationale de l’eau et aux pressions exercées sur les usagers pour se laisser faire sans plus d’information nous laisse à penser que cette affaire n’est pas transparente.

Nous travaillons avec les autres associations de défense des usagers de l’eau et de l’assainissement du département pour des réflexions et des actions communes. Signalons particulièrement l’écriture d’un règlement et des statuts de régie municipale d’un SPANC qui nous a bien servi dans notre action locale.

Le décor étant planté, partageons le fil de notre démarche :

Nous nous sommes vite rendu compte que les maires avaient une presque totale méconnaissance de ce dossier. Ils avaient délégué ces nouvelles obligations pour ne pas avoir une responsabilité supplémentaire.

Par courriers ou rencontres, nous avons engagé une politique d’information à leur égard afin qu’il interviennent dans les réunions syndicales pour obtenir un autre traitement des usagers et de vraies réponses aux questions posées, entre autre par la création d’une commission spécifique au SPANC traitant des problèmes locaux d’ANC avec des représentants d’associations de défense d’usagers en bonne place à l’intérieur.

Le maire de Pernes a demandé des explications au syndicat pour pouvoir informer les administrés, il n’a obtenu aucune réponse satisfaisante.. Il a également demandé la création d’une commission avec des usagers et s’est heurté à une fin de non recevoir.

Devant la volonté du syndicat de ne pas reconnaître les associations de défense d’usagers comme interlocuteurs et l’impossibilité d’un réel dialogue, nous changeons de stratégie et nous faisons campagne pour demander aux maires de notre sphère d’intervention géographique de reprendre la compétence SPANC.

Ce qui se passait avec le syndicat mettait en évidence que, plus les preneurs de décisions s’éloignent des usagers citoyens, moins ces derniers sont considérés et peuvent agir sur leur cadre de vie. Les décisions sont prises ailleurs et sans eux par des personnes qu’ils ne connaissent pas et qu’ils n’ont pas mis en place par un vote direct, contrairement aux maires.

Nous constatons également que le syndicat transfère systématiquement toutes les compétences qui lui sont déléguées à la SDEI (Suez-Lyonnaise). Pour ces contrôles ce fut un marché à bon de commande à la dite société, après à un appel d’offre pour lequel il semblerait qu’il n’y ait eu qu’un seul candidat (nous n’avons pas réussi à en avoir confirmation). Nous nous apercevons que des communes ayant traité directement avec la même société ont permis aux usagers d’avoir des contrôles moins chers. Logique car le syndicat ajoute au coût de la prestation de cette société une somme pour ses frais de SPANC. Force est de constater que l’effet d’échelle ne joue pas dans cette situation.

Nous militons donc pour un retour en régie communale, tant pour rapprocher les citoyens des preneurs de décision que pour obtenir des contrôles sans recours aux multinationales de l’eau qui ont une puissance financière importante. Elle leur permet un lobbying qui n’est plus à démontrer. Il sont sans cesse à la recherche de nouvelles niches de profit. (Ce que j’ai pu lire et entendre sur l’histoire de la distribution de l’eau dans notre pays tend à le montrer).

Nous ne voulions pas seulement une régie municipale de l’ANC, mais nous souhaitions que les citoyens usagers y aient une place non négligeable à l’intérieur pour se faire entendre. Il a toujours été clair que les élus conservaient le pouvoir de décision, c’est leur responsabilité. Par contre le règlement qui a été négocié à partir d’un texte que nous proposions (premier acte montrant l’accord de la mairie pour un travail en partenariat), encadre bien les exigences du SPANC et met l’accent sur son rôle de conseil, en ne lui donnant pas, comme c’est trop souvent le cas, un rôle de police de l’eau qui est de la seule compétence du maire.

Cette régie dont les statuts ont aussi été négociés sur un texte que nous proposions, s’est dotée d’une commission de recours amiable, où les représentants d’usagers sont présents. Ceci pour privilégier le dialogue aux combats juridiques. Il se renforce par la possibilité donné à l’usager concerné de se faire entendre directement, en étant assisté s’il le souhaite, ou d’être représenté.

Pour résumer, après 4 ans d’échanges nous sommes arrivés à une reprise de la compétence SPANC par la commune de Pernes. Elle s’exerce depuis le 1er janvier 2011 en régie municipale. Le retour en régie est intéressant en soi, mais ne garantit pas un fonctionnement respectant l’usager ; des dérives restent possibles. Ce qui a été mis en place à Pernes favorise le dialogue, et permet un contrôle citoyen de la structure sans enlever leurs prérogatives aux élus.

Relater cette expérience est intéressant, mais maintenant que ce SPANC est mis en place et fonctionne comme nous l’espérions, nous nous préoccupons des problèmes de financement des travaux qui seront nécessaires à certains usagers pour avoir des installations sans danger pour la santé humaine et pour l’environnement.

Là, le bât blesse. Sur proposition du gouvernement lui-même, contraint de transcrire la directive cadre européenne sur l’eau (DCE), nos députés ont voté une première, puis une seconde loi sur l’eau. (Je passe le lobbying certainement présent derrière tout cela).

Ils étaient très exigeants envers les usagers, mais ils n’ont pas décidé, en face des dépenses importantes pour ces derniers, d’aides au financement, ce qui revient à dire qu’une grande partie des usagers n’auront pas les moyens d’assurer les travaux nécessaire à la remise aux normes des installations d’ANC, et que les objectifs de ces lois ne seront pas atteints, même en tenant compte de la loi dite du « Grenelle 2 », qui a modéré les premiers textes.

Pour exemple, l’agence de l’eau Rhône Méditerranée nous a indiqué qu’elle a voté un budget pour 6 ans de 23 millions d’euros pour une estimation de 750 000 réhabilitations, ce qui fait une prévision de 30,66€ par installation qui, si elle doit être remplacée dans sa totalité, coûterait en fait entre 7000 et 12 000 euros…

Actuellement ne sont pris en compte que des installations prioritaires, zones de captage, pisciculture... Il ne reste plus à l’usager lambda de qui on exige des travaux que ses yeux pour pleurer devant l’injustice.

Tout ceci pour dire que cet aspect financier ne peut être passé sous silence.

Qui décide des priorités budgétaires de l’agence de l’eau ? Certainement pas des représentants d’usagers, car bien que ce soient les ménages qui financent à plus de 80% les agences de l’eau, il y ont peu de représentants, voire pas du tout.

Lorsque je parle de représentants, je fais allusion à des associations de défense d’usagers de l’eau et de l’assainissement qui ont un pied sur le terrain, et non à des associations ou autres groupements généralistes qui siègent dans beaucoup d’organismes en négociant avec les pouvoirs sur plusieurs dossiers à la fois. Il y aurait beaucoup à dire sur le sujet.

En conclusion, n’oublions pas que les citoyens usagers doivent avoir une place, et pas comme potiches, dans toutes les instances publiques qui gèrent leur quotidien. C’est un contrôle citoyen nécessaire dans toute démocratie. Car même une régie publique peut faire l’objet de toutes les dérives. A court terme, pour ce qui concerne l’assainissement non collectif, Il est temps de mettre des financements en face des dépenses exigées pour les ménages, puisque cela fonctionne déjà, en partie, pour l’assainissement collectif. »

Contact :

Bernard François

bfrancois84@free.fr

impression

pas de commentaire. ajoutez le votre!